Workshop Places en relation - Square de l’ancienne synagogue
Mettre en relation cent places dans dix villes autour du monde, de manière à faire apparaître la place elle-même – plus que la ville ou l’état – comme une véritable unité de sens à l’échelle politique et culturelle. Ce travail a consisté à étudier le Square de l’ancienne synagogue à Strasbourg.
Le contexte : la ville de Strasbourg et la frontière franco-allemande
La proximité avec la frontière allemande a marqué l’histoire de Strasbourg, dont les développements urbain, économique et social ont été fortement déterminés par le contexte frontalier. La ville se déploie en plusieurs quartiers depuis le centre ville historique, circonscrit par les bras de l’Ill, pour s’étendre vers l’est jusqu’à la frontière formée par le Rhin. Entre ce centre et l’Allemagne s’étire un espace de 250 hectares qui s’est pendant longtemps limité à des fonctions marginales, entre la friche à l’abandon ou l’accueil d’activités industrielles et portuaires, comme les anciens entrepôts Seegmuller ou les halles portuaires de Citadelle. Dans un contexte de renforcement des relations franco-allemandes, de développement des coopérations transfrontalières mais aussi de revalorisation de l’activité portuaire, la Ville de Strasbourg s’est engagée depuis 2015 dans un vaste projet de développement urbain qui consiste à réaménager, en plusieurs étapes, cet axe est-ouest qui ouvre sur l’Allemagne et la ville de Kehl à sa frontière. Plusieurs quartiers sont en cours de construction, agrégeant différents parc, places et services importants (médiathèque Malraux, clinique, etc.). Mais l’un des aspects les plus marquants de ce déploiement urbain reste peut-être l’extension de la ligne de tramway D, qui relie désormais la France à l’Allemagne en passant au dessus du Rhin, comme en écho aux lignes de la fin du XIXe siècle, qui permettaient déjà aux habitants des deux villes de circuler librement – à une époque où le Rhin n’était cependant pas une frontière. Bien-sûr, une telle transformation de l’espace urbain ne va pas sans poser de questions, et l’échelle des projets comme leur étalement dans le temps nécessite des réflexions qui n’ont pas toujours pu trouver leur place face aux logiques très pragmatiques de la promotion immobilière.
Le workshop : méthode, recherche, outils
La question des places publiques et de leur mise en relation a été abordée ici dans la perspective du contexte transfrontalier, en commençant par étudier les places qui jalonnent cet axe est-ouest en plein développement, dont la ligne de tramway D peut être envisagée comme une colonne vertébrale. Un travail préliminaire a consisté à étudier la répartition et la singularité des différentes places le long de cette ligne, avant d’en sélectionner dix, toutes très différentes. Certaines ont une longue histoire et sont depuis des centaines d’années des points névralgiques inscrits dans le tissu urbain, d’autres sont plus récentes ou même n’existent pas encore tout à fait (si l’on pense par exemple aux places en devenir dans l’ancienne friche portuaire). La ligne de tramway reste peut-être le seul élément que ces places hétérogènes ont en commun. La première grande étape a été un moment d’analyse, de recherche et de documentation qui s’est concrétisé par de larges portraits de chaque place, visibles sur les dix bandes verticales. Il s’agissait de mettre au point des outils de design graphique, communs à tous, qui puissent rendre compte des propriétés de chaque place pour les comparer entre elles. La cartographie, le diagramme et l’analyse visuelle ont ainsi permis de comprendre ces écosystèmes urbains que sont les places et qui diffèrent dans leurs aspects sensibles (lumière, son, climat, odeurs) mais aussi fonctionnels et sociaux (flux, activités, signes, etc.). L’usage dans cette recherche du design graphique, plus précisément du design d’information, permet de donner un éclairage singulier que les analyses urbaine, sitologique ou architecturale, auraient envisagé tout autrement. Ici les données donnent à comprendre les régimes de fonctionnement de ces places selon des paramètres qui ne sont pas immédiatement rapportés au bâti. Le deuxième moment de cet atelier, qui est encore en cours, « in progress », consiste à imaginer des moyens de transformer ou de renforcer les liens entre ces places, de les mettre en relation, ou du moins, de concevoir la relation (symbolique, fonctionnelle, esthétique) comme un véritable moyen de développement et d’amélioration de la qualité de vie au sein d’une communauté en milieu urbain. Enfin la relation est aussi celle qui relie entre elles des places de villes et de pays différents, permettant de considérer la place elle-même – plus que la ville ou l’état – comme une véritable unité de sens à l’échelle politique ou culturelle.
Informations liées au projet
Workshop mené par Ruedi Baur et Vivien Philizot